Les Croisades : Chapitre V

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Mes bien chers frères,

Vous pouvez retrouvez les cinq premiers articles sur ce même sujet ici même :
– Genèse
– Chapitre I : Du Concile de Clermont à la Prise de Jérusalem
– Chapitre II : De Baudouin Ier à Foulque d’Anjou
– Chapitre III : Saint Bernard & la IIème Croisade
– Chapitre IV : Nour-el-Din et Saladin
Je m’en vais vous faire voyager aujourd’hui, de la IIIème à la VIIIème Croisade en tâchant d’être concis sans omettre pour autant, d’éléments pertinents et capitaux.
Nous sommes en juillet 1187, Conrad de Montferrat vient d’arriver à Tyr, après les successives et lourdes défaites que j’ai évoqué dans le chapitre précédent, la Syrie Franque ne se réduit plus qu’à Tyr, Tripoli, Tortose et Antioche… cet homme va alors poser les premières pierres de la Résistance et va charger l’Archevêque de Tyr d’aller prêcher une nouvelle Croisade en Occident, à laquelle répondront les trois plus puissants seigneurs du continent : Frederic Barberousse, Empereur d’Allemagne, Richard Cœur de Lion, Roy d’Angleterre, et enfin, Sa Majesté Philippe-Auguste, Roy de France.

RECONQUISTA

 » Il n’est pas contraire à la Foi Catholique de chasser et poursuivre les Sarrasins, car les chrétiens ne prétendent pas s’approprier des Terres étrangères, mais rentrer en possession de l’héritage de leurs parents, dont ils avaient été injustement dépossédés par les ennemis de la Croix du Christ »
Sa Sainteté Célestin II, 1192

Cette citation est un appel du pape par une lettre encyclique, à la Reconquista dans la Péninsule Ibérique. Car si nous nous intéressons dans ce dossier à la Terre Sainte, il ne faut pas omettre de préciser que les Mahométans contrôlent une grande partie de l’Espagne, depuis qu’ils l’ont envahi au début du VIIIème siècle, avant que l’armée d’Abd-El-Rahman se brise sous les coups des Francs de Charles Martel en 732… Si les Francs avaient réussi à les bouter hors de l’hexagone, ils sont restés solidement installés en Espagne, et ce n’est que sous le règne d’Isabelle la Catholique au XVème siècle, qu’ils en seront définitivement chassés.
Sous Alphonse VIII dit « Le Noble », monté sur le Trône d’Espagne en 1158, les chrétiens d’Espagne reprirent du poil de la bête avec quantité de prises importantissimes, conséquences du Pacte de Cazorla (1179) et de ‘l’Alliance entre Alphonse de Castille et Alphonse d’Aragon, pour faire front commun face aux Mahométans. Le Roy Alphonse, était le père de notre illustre Reine, Blanche de Castille, qui sera bientôt marié au fils de Philippe-Auguste, futur Louis VIII.

LE FRONT FRANCO-ANGLAIS

Philippe Auguste, couronné 1er novembre 1179 et monté sur le Trône de France le 18 septembre 1180, passera sa vie à se frotter aux Anglais, principalement à Richard Cœur de Lion, puis à Jean Sans Terre. On peut considérer qu’à Bouvines (1214), il a mis fin à la Première Guerre de Cent Ans, qui avait commencé après la trahison d’Aliénor d’Aquitaine qui avait divorcé du Roy de France pour se marier à Henri de Plantagenêt qui venait de se faire Roy d’Angleterre.
Mais lorsque l’on fait une saine hiérarchisation des ennemis, il est évident, que même si les Anglais sont ce qu’ils sont, il est de mise de mettre ces conflits en sourdine pour s’allier contre l’Islam conquérant et s’en aller secourir la Syrie Franque. C’est ce qu’à sagement fait Philippe-Auguste.
Le 11 mai 1189, Frederic Barberousse quitte Ratisbonne à la tête d’une remarquable armée, arrivé à Constantinople, il s’aperçut que l’Empereur d’Orient, Issac l’Ange, avait pactisé avec Saladin et le tenait informé de l’avancée de la Croisade. Frederic contenait sa rage pour ne pas donner l’assaut sur Constantinople. Il traversa plutôt la Cilicie, mis en déroute les Seldjoukides et fît la jonction avec les Arméniens. Malheureusement, l’Empereur Germain se noya dans les eaux du Sélef le 10 juin 1190. Dans le même temps, se joue une guerre de tranchée aux abords de Saint Jean d’Acre, Guy de Lusignan tente de reprendre la ville par la terre, tandis que des navires Pisans, Génois, Vénitiens, Danois et Francs arrivent par la mer.
Le 4 juillet 1190, Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion quittent Vézelay pour la Terre Sainte, trainant en chemin, Notre Bon Roy arrivera à Saint Jean D’Acre le 20 avril 1191, pendant que Richard prenait Chypre à Issac Comnéne, pour arriver en Syrie à son tour le 7 juin 1191.
Le 11 juillet 1191, les troupes Franco-Anglaise entrent dans Saint Jean d’Acre et notre Roy se contentera de cette victoire… Il laissera 10 000 hommes continuer la Croisade, et regagnera la France.
Richard Cœur de Lion lui, reste en Terre Sainte. On ne le verra pas à son avantage le 20 août suivant, quand il fît égorger 3 000 prisonniers, ce qui dénote d’un manque criant d’esprit chevaleresque… pardon de lui préférer la noblesse de l’infidèle Saladin. Les deux chefs se mènent une guerre épique deux années durant, et finissent par signer un Traité de Paix grâce auquel les Francs consolident la reconquête des côtes, et qui surtout, permettait la libre circulation des pèlerins jusqu’à Jérusalem.
Le 28 avril 1192, Conrad de Montferrat est assassiné à Tyr par des islamistes fanatiques, le 4 octobre, Richard Cœur de Lion rembarque pour l’Occident, et enfin le 4 mars 1193, Saladin meurt à Damas… marquant la fin d’une période particulièrement animée et passionnante du Temps des Croisades.

SAINT JEAN D’ACRE, NOUVELLE CAPITALE FRANQUE

Depuis la prise de Jérusalem par Saladin le 2 octobre 1187, les Francs se cherchent une nouvelle place forte, et la prise de Saint Jean d’Acre tombe à point nommé. C’est la succession des Seigneurs Francs en cette cité qui va désormais nous intéresser, car ne nous reprendrons Jérusalem que par intermittence jusqu’à la fin définitive du Temps des Croisades (1291).
Henri II de Champagne épouse la veuve de Conrad de Montferrat (Isabelle), le 5 mai 1192, il régnera sur Sain Jean d’Acre jusqu’au 10 septembre 1197, date à laquelle il trouvera la mort à la suite d’une chute accidentelle. Amaury de Lusignan (frère de Guy), lui succède lui qui était déjà depuis peu, Roy de Chypre. Les barons de Syrie lui firent épouser Isabelle (désormais veuve de Conrad et d’Henri).
Amaury ne tarda pas à se distinguer en reprenant Beyrouth aux infidèles le 24 octobre 1197, puis il conclu la paix avec le nouveau Sultan Malik-el-Adil.
Pendant ce temps à Rome, Sa Sainteté Innocent III vient de prêcher une Quatrième Croisade (1199), malheureusement, celle-ci fût détournée par les Vénitiens qui livrèrent une guerre impie contre Constantinople, espérant fonder un Royaume Latin sur le Bosphore… ceci débouche sur le tristement célèbre épisode du Sac de Constantinople, ignoble déchainement de haine et de sauvagerie (pillage, massacre, viol etc…). Ceci dit, cet événement n’entache en rien le Christianisme, car il est de toute évidence l’œuvre d’hommes qui combattent pour des intérêts temporels, féodaux et même si j’ose dire, bestiaux. Ceci est une parenthèse dans le temps des Croisades, mais qui n’a rien à voir avec le véritable esprit chevaleresque censé animer le Croisé.
Le 1er avril 1205, Amaury de Lusignan rend son âme à Dieu, après avoir œuvré pour la pérennité Franque en Syrie et en Palestine, Jean d’Ibelin assura la régence jusqu’en 1210, date à laquelle Marie de Jérusalem (Montferrat) épousera Jean de Brienne.

LA CINQUIEME CROISADE PREPARE CELLE DE SAINT-LOUIS

Je fais volontairement l’impasse sur certaines périodes, si vous voulez en savoir plus sur celles-ci, l’historien René Grousset livre une histoire détaillé des Croisades en trois tomes, ce qui vous permettra d’avoir une vue plus complète de cette épopée longue de deux siècles.
Le 22 mai 1218, la Cinquième Croisade commence en Egypte, Jean de Brienne prend Damiette après 6 mois de siège, qui s’achèvent le 5 novembre 1219.
Pélage, prélat belliqueux envoyé par le Saint Siège, coûta cher à la cause en refusant d’échanger Damiette contre Jérusalem. Il nous coûta la défaite, puis la perte de Damiette… il fût sévèrement blâmé par le Pape Innocent III à son retour à Rome.
Damiette est perdu, mais on sait aujourd’hui, qu’un enfant qui a alors cinq ans à cette date, attend son heure. Il deviendra un Saint et le plus Juste et Illustre Roy que l’humanité ait connu (après Notre Seigneur Jésus-Christ bien entendu). Il reviendra prendre cette même cité quelques décennies plus tard. Je parle bien entendu de Louis de Poissy, fils du Dauphin Louis VIII et de Blanche de Castille.
Le 9 novembre 1225, l’Empereur d’Allemagne, Frederic II épouse Isabelle (fille Jean de Brienne et de Marie de Montferrat), ce qui fait de lui un prétendant sérieux au Trône de Saint Jean d’Acre. Seulement le 28 septembre 1227, il est excommunié par le nouveau Pape Grégoire IX, coupable de mener depuis des années le Saint Siège et la Chrétienté toute entière par le bout du nez par son double-jeu permanent.
 » C’est un tyran de la Renaissance égaré dans la belle société Chrétienne du XIIIème siècle «  La formule est de René Grousset.
Le 11 février 1229 interviennent les accords de Jaffa, où le Sultan El-Kamil (neveu de Saladin), restitue Jérusalem, Bethléem et Nazareth aux Chrétiens. Des clauses posaient problème, notamment celle qui laissait le Temple de Salomon (maison mère des Templiers) aux Islamistes, mais dans l’ensemble, ce traité était avantageux et il fût une cause de grandes réjouissances.
On doit cette prise à Frederic II, qui rentre en Italie en 1229… mais il faut souligner que s’il a réussi à obtenir de telles conditions, il le devait surtout à son Islamophilie et son anticléricalisme. Sur le papier, c’est une belle prise, mais concernant la manière, cela reste hautement contestable.
Entre 1229 et 1236, sous la houlette de Jean d’Ibelin, les Francs chassèrent les Impériaux de Chypre, d’Acre, de Tyr et de Beyrouth… à sa mort, le baron franc avait triomphé du Saint Empire Romaine Germanique. Il faut louer la parfaite dignité de vie, le sentiment d’honneur, la modération, la clémence, la sagesse, l’éloquence et les vertus chevaleresque de ce grand personnage de l’orient latin. S’il n’y avait plus à proprement parlé de « Royaume de Jérusalem », on lui doit d’avoir gardé de nombreuses et prestigieuses Seigneuries Franques -plus ou moins indépendantes les unes des autres-.
Ces Seigneuries continueront à s’étendre entre 1240 et 1241, durant ce que l’on a appelle « Le Croisade des Poètes » mené par le controversé mais fascinant chansonnier Thibaut de Champagne… J’aurais le plaisir de vous narrer son histoire en une occasion prochaine, si Dieu me prête vie.
Le 23 août 1244, Jérusalem est définitivement enlevée aux Francs par les Turcs Khwarizmiens.

CONCLUSION

Voilà mes bien chers lecteurs, la situation, au moment ou Notre Bon Roy Saint-Louis agonise dans son lit, et qui sauvé par la grâce de Dieu, promet de se croiser à son tour pour aller combattre sous l’étendard de Notre Seigneur Jésus-Christ. Sa Croisade en Égypte et sa consolidation du Royaume de Saint Jean d’Acre sera l’objet du VIème chapitre de mon Dossier du Le Temps des Croisades.
Nous avons donc vu aujourd’hui, que malgré une situation catastrophique en 1187, la Bon Dieu n’a pas abandonné les Croisés Francs qui loin de chez eux, ont su se relever et tenir encore des décennies pour l’honneur de Dieu, un front face aux Mahométans. Enfin que dire de la Bonté du Très-Haut, en nous donnant de tels exemples de vertu, de piété, d’esprit chrétien et de génie politique que furent Jean d’Ibelin et Saint Louis, huit siècles plus tard, nous en parlons encore, et ils nous inspirent encore. Il me tarde de vous narrer cela le mois prochain.

D’ici là, que Dieu vous garde !

Servus Mariae

BIBLIOGRAPHIE
– L’épopée des Croisades, René Grousset
– L’esprit de la Croisade, Jean Richard
– Histoire du Catholicisme en France, E.Delaruelle-A.Latreille-S-R Palanque
– Blanche de Castille, Philippe Delorme
– Vie de Saint Louis, Jean de Joinville
– Histoire de France, Jacques Bainville
– Histoire de la France, Jean-Christian Petitfils
– Pour en finir avec le Moyen-Age, Régine Pernoud



Publié par Louis-Antoine

Auteur-compositeur-interprète, rédacteur et analyste historique, politique et théologique. Propriétaire du domaine https://dieulafranceetleroy.fr et auteur de l'album du même nom.

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