Les Croisades : Chapitre VI

INTRODUCTION

Mes bien chers frères,

Vous pouvez retrouvez les six premiers articles sur ce même sujet ici même :
– Genèse
 Chapitre I : Du Concile de Clermont à la Prise de Jérusalem
– Chapitre II : De Baudouin Ier à Foulque d’Anjou
– Chapitre III : Saint Bernard & la IIème Croisade
Chapitre IV : Nour-el-Din et Saladin
Chapitre V : La Croisade des Monarques

Je vous conterai aujourd’hui cette aventure si paradoxale que fût celle où Notre Bon Roy Saint Louis prit la Croix pour défendre l’honneur de Notre Seigneur et de la France en Égypte, puis en Palestine.
Si il ne souffre nul contestation parmi les chrétiens que son épopée fût une source d’inspiration, il est pourtant évident que du point de vue politique et militaire, cette croisade là ne fût pas un franc succès, en tout cas dans un premier temps.
Revenons d’abord à l’origine de son vœu de se croiser ; sa maladie qui lui fît frôler la mort en 1244. Je fais volontairement l’économie d’un retour sur son enfance, sa vie et la politique qu’il a mené au sein du Royaume de France, j’y reviendrai de façon plus complète en d’autres occasions, nous nous en tiendrons pour lors au sujet qui nous intéresse ; la Croisade.

LE VŒU DE SAINT LOUIS

Prit par une dysenterie le 10 décembre 1244, le Juste est dans un état fort inquiétant. C’est même Jean de Joinville son biographe, contemporain et ami, qui nous apprend que ses dames de compagnies le croyaient mort.
Mais la piété populaire qu’on connait à ce grand siècle aura raison du mal, et saura obtenir de Dieu la guérison du Père de la Nation. Blanche de Castille, sa mère, fait apporter les reliques de la chapelle royale à son chevet, et organise des processions dans tout le royaume. À peine Saint Louis retrouva l’usage de la parole, qu’il en usa pour promettre à son Divin Bienfaiteur, de se croiser pour défendre Son honneur face aux infidèles.
Les affaires du Royaume étant plus urgentes, il devra remettre à plus tard son départ en Croisade, mais son intention est ferme et il la concrétisera en 1248.

DÉPART POUR CHYPRE, ADIEU À BLANCHE

Le 12 juin 1248, le Roy donne les pleins pouvoirs à la Reine Mère, Blanche de Castille. Il ne la reverra plus, celle qui a tant donné pour ses enfants, et pour notre Royaume, elle trépassera 27 novembre 1252, quand le Roy lui sera encore en Terre Sainte. Le Roy emporte tout de même avec lui le sceau permettant d’arbitrer les différents féodaux.
La Castillane affligée, reçoit du Saint Père Innocent IV une consolation de haute autorité :

« Très chère fille, vous êtes inquiète de l’absence de vos fils, réfléchissant aux périls qu’ils peuvent courir. Mais vous êtes trop inquiète. Car bien que leurs personne soient éloignés de vous, leurs cœurs en sont proches. Ce qui doit vous réconforter très chère fille, c’est qu’ils ont reconnu -humblement et grandement- les bienfaits dont Dieu les a comblé entre tous les princes du monde en entreprenant une expédition qui les couvre d’honneur parmi tous les fidèles. Ainsi, ils rendent hommage aux soins que vous n’avez cessé de leur prodiguer durant leur enfance, les instruisant dans la sagesse, la crainte et l’amour de Dieu. Ne soyez pas troublée et hésitante à leur sujet, fille très chrétienne, vous souvenant que le Rédempteur n’abandonne point ses fidèles et dévoués, et qu’il prend en main leur cause. Appliquez-vous à garder le Royaume de France dans un bon et tranquille état. Faites prier et priez incessamment. Quand à nous, nous ne cessons d’offrir à Dieu le Saint Sacrifice pour vos augustes fils. Au reste, comme la Sainte Mère l’Église vous porte dans son cœur avec un amour spécial, elle ne vous manquera pas dans vos besoins. Nous prions donc, avertissons et exhortons Votre Sérénité de rendre toujours à l’Église et à cette chaire de Pierre, l’honneur et l’obéissance qui leur sont dus. »

Avant son départ, Louis IX reçoit l’escarcelle et l’oriflamme des mains du légat du Pape, l’Abbé Saint Denis. Accompagné par le Reine Marguerite, le Roy embarque à Aigues-Mortes et fait escale à Chypre avec son armée, où il passera l’hiver entier.

PRISE DE DAMIETTE ET DÉFAITE DE MANSOURAH

En Juin 1249, il débarque sur les côtes égyptienne, et signe la retentissante victoire de Damiette le 6 juin. De son propre aveu, les excès auxquels se sont livrés ses chevaliers après la victoire (fastueux festins, péchés de chair, danses impudiques etc…) ont fait perdre à l’armée Franque la bénédiction de Dieu, et leur a coûté la victoire définitive en cette Croisade. Le 20 novembre, les croisés se mettent en marche vers le Caire, après que le Roy ait refusé d’échanger le départ des troupes contres Jérusalem, Ascalon et Tibériade. Il resteront bloqués par la Mansourah (bras du Nil) jusqu’en février.
Ils profitent d’une trahison dans le camp mahométan pour traverser le 8, mais Robert, frère du Roy, et ses soldats sont massacrés par les mamelouks, la faute à une offensive peu réfléchie et à un manque de prospection des forces en présence.
Le nouveau sultan fait couper les communications entre Damiette et l’armée du Roy, les enfermant dans un étau dont ils ne sortiront que prisonniers des mahométans.
Le 11 février, la bataille est perdue, Saint Louis ordonne la retraite vers Damiette mais il fini par capituler le 6 avril 1250, il est alors amené en captivité.
Jean de Joinville nous apprend sur cette défaite que « Par la faute d’un traitre nommé Marcel, les croisés rendirent les armes aux Sarrasins croyant obéir à un ordre du Bon Roy, Saint Louis était très malade, il avait ingénument fait négocier une trêve la veille. Cette trahison permit aux infidèles de faire beaucoup de prisonniers. »

Ne perdant pas courage face aux menaces de tortures de ses ennemis pour le faire apostasier, il leur prêche l’évangile et le Salut par la Croix, allant même jusqu’à leur affirmer : « j’ai lu le Coran de cet enchanteur Mahomet, je n’y ai vu qu’ordures et impuretés ». L’occasion de vous citer Saint Thomas d’Aquin, qui dira quelques décennies plus tard, au sujet de Muhammad : « Il a séduit les peuples par des promesses de voluptés charnelles au désir desquelles pousse la concupiscence de la chair. Lâchant bride à la volupté, il a donné des commandements conformes à ses promesses, auxquels les hommes charnels peuvent obéir facilement. »

Le 8 mai, les Mamelouks renversent le sultan, et acceptent de négocier la libération du Roy, c’est d’ailleurs à ce moment qu’un émissaire de Louis IX venant demander aux Templiers de régler la rançon, se voit essuyer un refus de leur part.
Le Roy accepte à contrecœur un accord pour sa libération, et quitte l’Égypte direction Saint Jean d’Acre où il débarquera le 13 mai.

SAINT-LOUIS REVANCHARD

L’honneur empêche le Roy de rentrer en France sur cette défaite. Ayant laissé des prisonniers en Égypte, il fait le serment à Dieu de ne point s’en aller sans les avoir libéré. C’est pourquoi il entreprend cette mission en Syrie.
En 3 ans de présence en Terre Sainte, il obtint en effet par ses victoires la libération (sans rançon) des prisonniers d’Égypte, il réconcilie les barons et pérennise les conquêtes franques en consolidant les forteresses d’Acre, Césarée, Jaffa et Sidon.
Le Roy Très Chrétien ne verra pas Jérusalem et le tombeau de Notre Seigneur alors que les Turcs lui en offraient la possibilité.
« Beau Sire Dieu, je Vous prie que vous ne permettiez pas que je vois la Sainte Cité, puisque je ne peux la délivrer de Vos ennemis. »
Il profite de sa présence pour envoyer des missionnaires auprès du Grand Khan, preuve d’une grande prévoyance et d’un zèle apostolique infatigable. En effet, quand les Mongols prendront Bagdad quelques décennies plus tard, ils compteront parmi eux de nombreux chrétiens, et le choix de Saint-Louis en est l’une des causes. Il quitte Saint Jean d’Acre le 22 avril 1254 le devoir accompli, car malgré le trépas de sa mère bien-aimé en 1252, il a choisi de ne pas abandonner à leur triste sort les populations chrétiennes de Syrie et de Palestine.

LE CROISADE DE TUNIS


« Ceux qui lui ont conseillé le départ pour Tunis ont fait un péché mortel, depuis son départ, la situation du Royaume ne fait qu’empirer » Jean de Joinville

De 1254 à 1270, Saint Louis régnera sur la France avec le talent et la vertu de justice qu’on lui connaît, ça sera le sujet d’un autre article, mais restons-en aux Croisades.
Un émissaire de confession juive va voir le Bon Roy, et prétend que le Sultan de Tunis est prêt à se convertir au Catholicisme si des forces chrétiennes lui venaient en aide afin de lui permettre d’assumer ce choix face aux mahométans qui l’entouraient. Le Roy tombe malheureusement dans ce piège perfide, et décide alors de se croiser à nouveau.
Il reprochera à son ami et biographe Jean de Joinville de ne pas se joindre à lui, mais il emmènera tout de même avec lui ses deux frères Alphonse de Poitiers et Charles d’Anjou, ainsi que le dauphin, futur Philippe le Hardi.
Le 18 juillet 1270, le Roy et son armée arrivent au pied des murailles de Tunis.
Le Sultan ne se converti pas, et fait appelle aux mamelouks pour le secourir. S’ensuit alors un siège à l’issue dramatique, une épidémie de peste se répand au sein de notre armée. Le 2 août, Jean-Tristan le fils du Roy rend son âme à Dieu, et ce dernier le suivra le 25 août suivant.
Avant de trépasser, le Saint Roy laissera à son successeur et fils bien-aimé, un testament que je vous invite à lire, tant il renferme de sagesse, de charité, de piété, et d’amour de Son Royaume et des sujets.
« J’aimerais mieux qu’un Écossais vint et gouvernât bien et justement le peuple du royaume plutôt que tu le gouverne mal. » Testament de Saint-Louis
« 

Après la mort du Roy, une partie des troupes se retirèrent, car Philippe le Hardi était trop inexpérimenté pour prendre la tête de la Croisade, et la prudence l’obligeait à regagner son Royaume, étant désormais le nouveau Roy de France. Charles d’Anjou prendra un temps la direction des opérations et réussira quelques prises, et obtiendra même un accord le 30 octobre permettant une liberté de commerce aux marchands chrétiens, et le droit à ceux-ci de prier et de prêcher publiquement à Tunis.

CONCLUSION

Certains diront que le succès des Croisades de Saint-Louis est relatif voir inexistant, je ne partage pas cette vue.
En plus de nous avoir laissé un exemple indélébile de ce que doit être un Roy Chrétien, cette entreprise a aussi permis à la Syrie Franque de durer un demi-siècle de plus.
Nombreux sont les chrétiens vivant en Syrie qui doivent à la venue de Saint-Louis, d’avoir pu jouir d’une sécurité et d’une prospérité dont ils n’eurent point bénéficié auparavant. Nombreux sont aussi, les mahométans édifiés par le degré de vertu exercé par Notre Bon Roy (à l’image du Général De Sonis en Aglèrie Française). Le sultan du Caire disait « N’avoir jamais vu un aussi fier chrétien » quand le Roy tentait de convertir ses geôliers du fond de sa cellule.
Dieu seul sait combien de conversion a produit cette épopée et cette démonstration de courage, d’amour et de fidélité à Son Dieu de la part du Roy de France. Si aujourd’hui Notre Bon Roy trône sur les autels, et intercède chaque jour auprès de Dieu pour la Salut de la France, il le doit beaucoup à ses courageuses croisades qui comptent parmi les éléments les plus propices à faire de lui un Saint.
Je vous donne rendez-vous en août pour le dernier chapitre de ce dossier sur les Croisades, jusque là, que Dieu vous garde, mes bien chers lecteurs.

Saint-Louis, patron des Armées Françaises, priez-pour la France.

Servus Mariae


BIBLIOGRAPHIE
– L’épopée des Croisades, René Grousset
– L’esprit de la Croisade, Jean Richard
– Histoire du Catholicisme en France, E.Delaruelle-A.Latreille-S-R Palanque
– Blanche de Castille, Philippe Delorme
– Vie de Saint Louis, Jean de Joinville
– Saint Louis : Roi de France, Cardinal Pie, Dom Guerranger, Marquis de la Franquerie
– Saint Louis et son temps, Henri Paul Eydoux
La France sous Saint-Louis et Philippe le Hardi, M.A Lecoy de la Marche
– Le Roman de Saint Louis, Philippe De Villiers
– Histoire de France, Jacques Bainville
– Histoire de la France, Jean-Christian Petitfils
– Pour en finir avec le Moyen-Age, Régine Pernoud

Publié par Louis-Antoine

Auteur-compositeur-interprète, rédacteur et analyste historique, politique et théologique. Propriétaire du domaine https://dieulafranceetleroy.fr et auteur de l'album du même nom.

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