Les Croisades : Chapitre I

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INTRODUCTION

J’ai mis en lumière dans le précédent article touchant aux Croisades, quelques clés de lecture qui pourront je l’espère, vous aider à comprendre d’où vient cet esprit et cette ambition chevaleresque, qui ne sont pas nés du jour au lendemain à Clermont-Ferrand en 1095.

Dans sa lutte incessante contre l’hérésie et l’erreur, des temps apostolique à ce XIème siècle finissant, la Sainte Église du Christ a toujours affirmé sa vocation de Gardienne Fidèle du Dépôt de la Foi et de Guide missionné par Notre Seigneur pour paître le troupeau afin d’éviter qu’il ne s’égare. Le Pape Français Urbain II fera plus que de paître ses brebis, il va leur porter secours par les armes en organisant cette prodigieuse campagne, qui finira par fédérer la quasi-totalité des Monarchies Européennes -et l’Empire Germanique-, contre la menace islamiste.

Je reviens dûment sur la situation géopolitique de la Terre Sainte ; en 969, avant le Grand Schisme, l’Empire byzantin avait repris Antioche aux mahométans, en 975, l’Empereur Jean Tzimiscés s’était établi à Damas avec sa cour. En 1055, arrivé des Steppes d’Asie, Toghroul-Beg le Seldjoukide multiplia les victoires militaires, lui permettant ainsi de superposer le nouvel Empire Turc à l’Empire Arabe après la prise de Baghdâd. Il meurt en 1063 et son successeur et sa redoutable armée, parvinrent à récupérer Antioche aux Byzantins en 1085.
En l’an 1092, à la mort de Mélik-Châh, ses descendants se querellèrent et se partagèrent leurs possessions à l’image des petits-enfants de Charlemagne, cela affaiblissait leur Empire et rendait propice une intervention de la chrétienté européenne. 

LE CONCILE DE CLERMONT

La Croisade a été voulue par un Pape Français, prêchée par un Moine Français, et a d’abord recueilli l’adhésion du Roy de France… Quelle fierté pour nous, héritiers de cette Grande Histoire, d’être associés si étroitement à cette épopée mémorable qui vit s’illustrer tant de héros, chevaliers, religieux, petites gens, rois et seigneurs.

Le 27 novembre 1095, Sa Sainteté Urbain II prêche la Croisade à Clermont-Ferrand, par son éloquente prédication, il parvint à réunir les armées de Pise, Venise, Gènes, des Deux-Siciles, les Normands, les Francs et bien d’autres peuplades européennes. La succès le plus important de la Croisade, fût sans doute de repousser de trois siècles la catastrophe, qui aboutira en 1453, avec la prise de Constantinople par les Turcs. Aujourd’hui, l’Islamisme est confortablement installé en Europe, avec toutes les contrariétés que cela implique. Lors de ce Concile, le Saint Père affirma cette Vérité qui me semble nécessaire de rappeler, afin qu’on ne se méprenne pas sur le véritable esprit de la Croisade.

« Le Croisé ne va pas à la Guerre pour tuer, mais pour se faire tuer »

Voilà qui est dans la droite ligne de l’enseignement et de l’exemple de Notre Seigneur Jésus-Christ, à sa suite nous devons donner notre vie pour ceux que nous aimons et pour les plus petits d’entre nous.
La Mission doit être entreprise avec douceur et fermeté, laissant une certaine liberté au païen à qui on prêche l’Évangile, d’embrasser ou non la Voie Divine. C’est ce qu’ont montré les missionnaires catholiques en Afrique, en Asie et en Amérique. Dieu sans Sa Grande Sagesse attend l’adhésion de notre volonté à Son Amour, il est donc de notre devoir de proposer l’Évangile et la Vérité aux âmes errantes, de planter en leur cœur une graine, que Dieu seul rendra fertile si Il le veut. Les conversions forcés dans les rares cas où elles ont lieu, ne sont pas l’œuvre de véritables catholiques.
Mais quand alors, l’ennemi met en danger l’intégrité de la vie et de la liberté des chrétiens comme c’était le cas des Seldjoukides, il est Juste et Bon de prendre les armes pour défendre les plus faibles. Mourir sous le cimeterre des infidèles pour défendre Notre Seigneur, nous assure infailliblement la Couronne Éternelle mais permet aussi d’inspirer les générations futures, les vendéens en sont un autre exemple plus récent, face à cette autre engeance infidèle qu’étaient les bourgeois républicains de 1793.

« Toutes les assises de l’Église sont cimentées avec le sang des martyrs mêlé à la sueur des apôtres » Abbé Arminjon

LES PREMIERS MOUVEMENTS DE LA CROISADE

En 1096, le Moine Pierre l’Hermite, prit la tête de la Croisade dite populaire, qu’on peut assimiler davantage à un simple pèlerinage. Cependant, des vagabonds et des brigands se joignirent à elle, profitant du cortège pour perpétrer d’odieux pillages, principalement en Hongrie. Voilà déjà les premiers fruits pourris venant de ceux qui s’attachant à une cause noble, faisant fît de tout esprit chrétien, s’abandonnent à de viles pratiques. Les « troupes » de Pierre l’Hermite composées principalement de petites-gens, furent massacrées par les Turcs sur le chemin de Nicée, laissant seulement 3000 survivants sur 15 000 pèlerins. C’était un mouvement inoffensif, mais les mahométans n’eurent aucune pitié.

Dans le même temps différents cortèges se formèrent, l’un mené par l’humble, pieux et valeureux Godefroy de Bouillon, un autre par Bohémond de Tarante, et un troisième par l’Archevêque de Clermont Adhémar de Monteil et le Comte de Toulouse Raymond de Saint Gilles. Le Fils de Guillaume le Conquérant, Robert Courte-Heuse, Comte de Normandie, se joignit également à l’expédition.

L’AMOUR VACHE ENTRE OCCIDENTAUX ET BYZANTINS

C’est en 1054 qu’éclate le Grand Schisme Grec, qui séparera pour de bon l’Église auto-proclamée « Orthodoxe » et la Sainte Église Catholique et Romaine. Cela entraînera de graves conséquences sur les croisades, qui auraient eu un tout autre succès sans cette regrettable division.
En 1097, à contre-cœur, Godefroy de Bouillon prêta allégeance à l’Empereur de Constantinople, Alexis Comnéne. Il fît cela pour éviter un conflit entre puissances chrétiennes, faisant preuve de prudence et d’une saine hiérarchisation des ennemis. Bohémond de Tarente fît la même allégeance, avec des intentions bien moins louables ; il avait dans sa jeunesse subit une défaite contre ces mêmes Byzantins, et il était prêt à trahir son sermon s’il le fallait, ce qui est indigne d’un chrétien et d’un chevalier. De plus, sa véritable intention était de se tailler un bout de lopin en Terre Sainte. Malheureusement il ne fût pas le seul en ce temps des Croisades, à mépriser le véritable esprit de cette entreprise au profit de son intérêt matériel et personnel. On verra de nombreux Seigneurs qui possédant selon eux, des Duchés peu enviables de notre Royaume, se mirent en tête de régner sur de prestigieuses cités en Syrie et en Palestine (Damas, Acre, Antioche, Tibériade etc…).
Nous reviendrons sur les conflits entre Catholiques et Orthodoxes durant les Croisades, qui nous firent payer le prix fort, au grand profit de l’Empire Turc.

DE BYZANCE A ANTIOCHE

Dans le courant du mois de mai 1097, de concert avec Alexis Comnéne et son armée, les Croisés prirent facilement Nicée, mais le premier triomphe véritablement conséquent, est celui de Dorylée (1er juillet), qui ouvre un siècle et demi de domination Franque en Orient. Dès lors, un respect mutuel prit naissance entre les Turcs -habitués à écraser Arabes, Arméniens, Grecs et Syriens- et Francs. Du propre aveu des Turcs « Nul, à part les Francs et nous même, n’a le droit de se dire chevalier ». En traversant la Cilicie, Baudouin de Boulogne et Tancrède se trouvèrent de nouveaux alliés ; les Arméniens, peuple qui aura souvent son mot à dire dans l’épopée qui va suivre.
Le 21 octobre, Bohémond arrive devant Antioche à la tête d’une armée, Yâghi Siyan, l’émir, ne fût pas secouru par son Souverain Ridwan, Roi d’Alep, ni par Douqaq, Roi de Damas, à cause de leurs récentes querelles, l’occasion de noter qu’au delà de ces dissensions, il y en avait également entre les Fatimides d’Égypte et les Abbassides, qui n’entretenaient que rarement des relations cordiales. Bohémond par un caprice, obtint la promesse des autres chefs de lui laisser la possession d’Antioche, il monta les Byzantins contre les Francs pour se débarrasser de leurs prétentions. C’est en cet automne, que les Francs et les Fatimides passèrent un accord pour se partager la dépouille des Abbasside. Les Fatimides prirent Jérusalem le 26 août 1097. Le siège d’Antioche sera achevé en juin 1098, le 14 de ce même mois, le paysan Pierre Barthélemy, eût une vision qui lui désigna l’endroit où se trouvait la Sainte Lance -qui avait percé le corps de Notre Seigneur après Sa mort en Croix-, ce qui galvanisa les troupes qui pénétrèrent enfin dans la ville.
Le Prince de Mossoul, Karbôgâ, s’avisa de venir au secours d’Antioche mais il fût vaincu par les troupes de Raymond de Saint Gilles le 28 juin.

GESTA DEI PER FRANCOS

Les Francs ne perdirent jamais de vue l’objectif suprême de cette expédition ; la Ville Sainte, vers laquelle ils se dirigèrent dés lors qu’Antioche fût prise.
Il faut reconnaître que les chicanes féodales ont mis du plomb dans l’aile à la cohésion de notre armée, à tel point que les croisés finirent par se révolter contre leurs chefs afin de leur rappeler la fin originelle de la Croisade. Dés l’arrivée des Francs à Bethléem, Grecs et Syriaques les acclamèrent, sortant les Croix et les Évangiles en chantant des Psaumes pour fêter l’événement, ces pauvres gens étaient enfin libérés de plusieurs siècles d’oppression mahométane.

Le 15 juillet 1099, Jérusalem était entre nos mains après deux mois de siège. Si l’on peut déplorer le manque d’esprit chevaleresque de certains, achevant des prisonniers que Bohémond avait juré d’épargner -ce qui eut le don de le rendre furieux-, la victoire fût dans l’ensemble glanée loyalement par nos soldats. Godefroy de Bouillon fût désigné par ses pairs, pour devenir le Souverain de Jérusalem, mais dans sa grande Justice et dans sa profonde Humilité, il prit simplement le titre « d’Avoué du Saint Sépulcre » proclamant : « Le seul Roi de Jérusalem s’appelle Jésus-Christ ».

CONCLUSION  

Moins de quatre années séparent l’appel du Saint Père Urbain II à Clermont-Ferrand, et la Prise de Jérusalem par les Francs. Quelle prompte et prodigieuse conquête que la Foi transcendante de nos ancêtres a permis. Il y a certes quelques ombres au tableau, mais il est Ô combien délectable, de s’intéresser plus en profondeur à des héros tels que Godefroy de Bouillon et Raymond de Saint Gilles. Je vous y invite instamment, vous y trouverez des modèles de Courage, de Piété et d’Honneur qui inspireront vos enfants. Nul besoin d’aller chercher dans des œuvres de fiction, où hors de nos terres, l’Histoire de la Sainte France est jonchée d’hommes valeureux qui méritent que nous pérennisions leur héritage et que nous les fassions connaître.

Dans le prochain chapitre, nous nous intéresserons justement, plus en profondeur à Godefroy de Bouillon, et nous verrons comment nos Seigneurs ont assis leur domination sur la Syrie Franque, les obstacles qu’ils ont rencontré, les différents protagonistes ayant régné sur Jérusalem. Il s’étendra de 1099 à 1146, moment choisi par Saint Bernard de Clairvaux pour prêcher la deuxième Croisade, ce qui sera l’objet du IIIème chapitre.

D’ici là, que Dieu vous garde !

Servus Mariae

Bibliographie
– Dix Héros Français, Ivan Gobry
– Le Grand Schisme d’Occident, M.L Salembier
Godefroy de Bouillon, Alphonse Vétault
Godefroy de Bouillon, J.Collin de Plancy
– L’épopée des Croisades, René Grousset
– L’esprit de la Croisade, Jean Richard
– Histoire du Catholicisme en France, E.Delaruelle-A.Latreille-S-R Palanque
– Histoire de France, Jacques Bainville
– Histoire de la France, Jean-Christian Petitfils
– Pour en finir avec le Moyen-Age, Régine Pernoud


Publié par Louis-Antoine

Auteur-compositeur-interprète, rédacteur et analyste historique, politique et théologique. Propriétaire du domaine https://dieulafranceetleroy.fr et auteur de l'album du même nom.